CowBoy Bebop

Techniquement parlant, on peut dire que Cowboy Bebop est une franche réussite. La série a visiblement disposé de moyens importants, et a très certainement bénéficié du fait que la moitié des épisodes soient à l'origine des OAV, généralement plus soignés. Le character design est très réussi, en particulier les personnages de Faye et Jet à mon sens, et a une volonté clairement réaliste. L'animation n'est pas en reste: les mouvements sont fluides et élégants, ce qui met notamment en valeur les scènes de bagarres, véritablement orchestrées comme des ballets par le maître Watanabe, qui nous offre une réalisation exemplaire, avec des coups d'audace, de véritables éclairs de génie (je trouve la scène de la chute de Spike dans Ballad of Fallen Angels une vraie petite merveille) et une approche profondément originale qui rend hommage à de nombreux classiques du cinéma, ainsi qu'au cinéma de Hong Kong et notamment à John Woo, que Watanabe apprécie particulièrement. La précision des décors, très détaillés, ainsi que le soin apporté au design des différents vaisseaux et autres véhicules, renforce encore cette impression de réalisme voulue par les auteurs. On a aussi droit à quelques scènes en 3D, pas toujours très réussies hélas, mais heureusement plutôt rares, et qui au final ne gâchent pas le plaisir.

Si l'aspect visuel de Cowboy Bebop constitue un atout non négligeable, ce n'est cependant pas le facteur qui rend la série aussi attachante. Ce qui fait le charme - et le succès - de Bebop, c'est en premier lieu son ambiance. Et c'est une ambiance très particulière: je n'ai jamais vu une série aussi ouvertement désabusée et fataliste. Il flotte sur toute la série un parfum d'illusions perdues, de rêves envolés, de bonheur à jamais disparu. Et a-t-on jamais vu une troupe de "héros" aussi peu fringuante que celle de l'équipage du Bebop? Personnages eux aussi brisés, à la recherche d'une part essentielle d'eux-mêmes qu'ils ont perdue dans ce qui semble être une autre existence, et sans laquelle ils ne sont plus que des pantins désarticulés dont le seul but est de survivre. Un amour disparu, un bras sacrifié, un passé évaporé... Le seul personnage résolument optimiste est Ed, cette étrange fillette plus fine et sensible qu'il n'y paraît. Est-ce l'innocence de la jeunesse qui lui permet d'échapper au pessimisme ambiant? Toujours est-il qu'elle est la seule qui trouvera sa part manquante... qu'elle ne cherchait même pas. Encore une fois, triste ironie du sort...
Mais il ne faudrait pas croire que Cowboy Bebop soit une série déprimante, loin de là! Les auteurs s'ingénient en effet à brouiller les pistes constamment, en nous offrant des scènes d'action trépidantes et un humour noir, souvent grotesque et décalé, ainsi que des moments de pure poésie où le temps semble suspendu. Mais cela ne fait illusion qu'un instant. A la fin du compte, nos voyageurs de l'espace se retrouvent aussi pauvres... et encore plus désabusés qu'avant après leurs différentes plongées dans l'abîme de l'âme humaine...
Car l'autre grande force de Bebop, ce sont ses personnages, absolument extraordinaires, une galerie de portraits unique dans le monde de l'animation japonaise. Des personnages humains, complexes, vivants, et surtout, vrais. Tout le long de l'histoire, on a la même impression: cela sonne juste, comme si les auteurs avaient lâché leurs créatures dans le monde qu'ils ont préparé pour elles et les avaient laissées se développer par elles-mêmes. Rien n'est forcé, les actions et réactions des personnages sont naturelles, sans stéréotypes. Et cela donne une impression de continuité malgré le fait que la trame générale soit très lâche et que les épisodes soient indépendants les uns des autres. Les auteurs sont parvenus à construire un univers tout-à-fait cohérent, dans lequel des personnages et des destins se croisent au fil de petites histoires ciselées comme de bijoux. Chaque épisode est un univers en lui-même, dans lequel l'homme est mis à nu et expose aux yeux de tous ce qu'il y a de meilleur et de pire en lui. Les vingt-six joyaux d'une même couronne. Et parmi ces joyaux, deux absolus chefs-d'oeuvre à mes yeux, les deux épisodes doubles, Jupiter Jazz et Real Folk Blues, qui sont pour moi des sommets de poésie nocturne et de lyrisme tragique.

Vous l'aurez sans doute compris, Cowboy Bebop est une série qui m'a laissé une impression forte, qui m'a véritablement marqué par son univers sombre, lyrique et humoristique à la fois (ne dit-on pas que l'humour est la politesse du désespoir?), baigné par les superbes musiques de Yoko Kanno. Les personnages sont vraiment attachants et resteront avec vous longtemps après la fin du visionnage, de même que cette étrange impression de tristesse douce-amère qui baigne tout l'animé.
C'est une série véritablement culte pour moi, l'une de ces séries auxquelles on peut revenir encore et encore, et y trouver à chaque fois quelque chose de nouveau. C'est à mon sens une oeuvre à posséder dans sa vidéothèque.
Alors, si vous sentez prêt à partir pour un périple d'exploration de l'âme humaine, embarquez avec Spike, Faye et les autres à bord du Bebop, vous ne regretterez pas le voyage!

Originalité
Plaisir visuel
Scénario
Réalisation

Bilan

Dossier réalisé par Fred Pirotte (Algol)
Design © Simon Van Daele 2003.
© 1998 SUNRISE Inc.

Cowboy Bebop (Sunrise) - 152885hits
Copyright (c) DVDAnime.net